Sept questions au Père Claude Siebenaler SCJ
Le P. Claude Siebenaler est depuis le 14 mars 2016 nouveau supérieur à Cinqfontaines. Nous lui avons posé quelques questions concernant sa nouvelle charge.
P. Claude, vous êtes quelques mois déjà à Cinqfontaines. Comment avez-vous vécu le changement de Rome dans ce couvent perdu dans les forêts du nord de Luxembourg ?
Presque tout le monde m’a fait cette remarque : « sapristi, quel changement ! » C’est vrai, Cinqfontaines n’est pas Rome, où j’ai passé, par la grâce de Dieu, une très belle période de ma vie au service de la Congrégation qui m’a donné beaucoup. Mais au lieu de regarder en arrière, je préfère regarder l’avenir et mettre en lumière tous les aspects positifs du changement : retrouver des amis de longue date, les gens sympathiques de l’Oesling, une région fascinante, le calme, le contact avec la nature … Plier bagage et commencer une nouvelle expérience représente également un défi qui peut être très salutaire.
Pouvez-vous décrire un peu vos engagements pendant les 34 années passées à Rome ?
Quand le Père Général m’a demandé, il y a 34 ans, de quitter le Chili, où j’ai passé mes 8 premières années de sacerdoce, pour aller à Rome aider le P. Jean-Pierre Gindt au secrétariat général, ma première réaction était : « Non, merci ! Ma place n’est pas dans un bureau, mais au milieu du Peuple de Dieu, dans l’apostolat, à côté des gens pauvres, en marge de la société ». De 1973 à 1978 j’ai vécu, heureux et content, dans un bidonville de Curicó, au sud du pays, et je garde d’excellents souvenirs de ces personnes d’une générosité et d’une cordialité singulières. Elles m’ont appris beaucoup de choses, entre autre, la nécessité de former des laïcs et de leur céder de plus grandes responsabilités dans l’Église, pour faire face au manque de prêtres.
Mais ensuite le Seigneur m’a fait découvrir que ce qui compte, c’est de faire sa volonté, non la mienne : « Ecce venio ». Et le changement du Chili à Rome a été très salutaire. Je me suis vite trouvé à l’aise dans le service pour la Congrégation : 17 ans comme secrétaire général, 11 ans comme procureur général, 5 ans au Centre d’études dehoniennes, et à côté de cela, 22 ans comme conseiller ecclésiastique de l’Ambassade du Luxembourg près le Saint-Siège. Ce que j’ai apprécié surtout, c’était la confiance et l’amitié de mes supérieurs et des confrères de cette grande communauté de la maison centrale, curie et collège international, qui m’a porté, soutenu, enrichi, fait croître au fil des années.
Et maintenant, vous êtes à Cinqfontaines : pouvez-vous décrire ce couvent et ses activités ?
Depuis 1973 le couvent est un centre d’animation et de formation spirituelle, disposant d’une grande chapelle, de deux salles de conférences, d’une salle à manger, d’une salle de récréation, de 22 chambres individuelles et d’une « suite » avec 3 chambres, douche et toilette, plus la partie réservée à la communauté religieuse. Il offre la possibilité d’organiser des exercices spirituels, des sessions de formation (préparation à la confirmation, au mariage, …), des rencontres d’agents pastoraux, mais aussi des manifestations culturelles ou des activités visant la « santé de l’âme et du corps », comme p. ex. les cours de jeûne thérapeutique de Mme Modesta Bersin, bien fréquentés. La maison accueille également des familles ou des personnes individuelles qui veulent échapper au stress de la vie quotidienne pour retrouver leur équilibre intérieur dans le calme et le contact avec la nature, ainsi que des étudiants qui viennent ici pour préparer leurs examens. À côté du couvent, le home Léon Dehon peut accueillir une soixante de jeunes dans 8 chambres à 8 lits.
Le P. Schumacher est engagé à plein temps dans la communauté pastorale de Wincrange (11 paroisses).
Et l’histoire de Cinqfontaines ?
Cinqfontaines est la plus ancienne maison que la Congrégation possède au Grand-Duché de Luxembourg. En 1903, – la Congrégation n’était pas encore divisée en Provinces – nos Pères allemands ont acheté une ferme avec un terrain agricole et un vieux moulin, dit « Pafemillen », près de Troisvierges, pour y fonder un noviciat. La construction du couvent proprement dit commença en 1906, selon les plans de l’architecte allemand Johannes F. Klomp, auquel nous devons également l’abbaye bénédictine et l’église décanale de Clervaux. Le Père Dehon y est passé.
En 1941, les Nazis ont chassé la communauté religieuse et transformé le couvent en camp de rassemblement pour les Juifs de Luxembourg, camouflé officiellement en « maison de retraite pour personnes âgées juives ». À partir d’ici, environ 300 personnes ont été déportées aux camps de concentration et d’extermination, Theresienstadt, Litzmannstadt et Auschwitz. Un monument inauguré en 1969 rappelle cette page sombre de l’histoire. Depuis lors, tous les ans, le premier dimanche du mois de juillet, une cérémonie commémorative, organisée par l’A.s.b.l. Memoshoah, a lieu devant le monument pour garder le souvenir de cette tragédie. Cinqfontaines est donc aussi un lieu de mémoire. Cette même association projette de construire à côté du monument un centre de rencontre et de documentation sur la Shoah.
Après la Seconde Guerre mondiale, la maison est devenue le noviciat de la Province luxembourgo-wallonne. Le maître des novices était le P. Marcel Denis, dont le souvenir reste bien vivant, entre autre grâce à ses nombreuses sculptures en bois qui peuplent encore le couvent.
Depuis 1973, Cinqfontaines offre les services reportés ci-dessus.
Vous venez d’être nommé supérieur de la communauté de Cinqfontaines. Comment comprenez-vous ce service d’autorité ?
Selon l’esprit de l’Évangile, toute autorité dans l’Église est avant tout un service, à l’exemple du Christ, qui a lavé les pieds de ses disciples. Les occasions pour rendre des services ne manquent pas. Conscient de mes propres limites, je demande au Seigneur la grâce de me faire découvrir, jour après jour, ce qu’il attend de moi et de me rendre toujours plus attentif et docile à ses inspirations.
Cinqfontaines est un couvent qui accueille des personnes individuelles, mais aussi des groupes. Quelles perspectives envisagez-vous pour l’avenir ?
Les responsables des groupes qui fréquentent Cinqfontaines depuis des années ont poussé un soupir de soulagement à la nouvelle que le couvent ne fermera pas ses portes, même si l’avenir reste incertain. Le fait que les gens se montrent satisfaits de leur expérience passée ici et aiment retourner sur place signifie que les services offerts répondent à un besoin. Un peu plus de publicité ne ferait pas de mal pour faire connaître ce qui se fait déjà. Nous pensons à un site internet présentant la maison de Cinqfontaines …
Votre communauté est petite. Que pensez-vous faire pour assurer l’avenir ?
Un ou deux confrères en plus seraient évidemment les bienvenus, mais il faut rester réaliste. Peut-être devrons-nous chercher d’autres chemins pour assurer l’avenir de la maison et de ses services. Il y a quelque temps, l’a.s.b.l. MemoShoah a contacté l’administration provinciale pour un projet de centre de mémoire en relation avec le monument Auschwitz de Cinqfontaines. Il vaudra voir la suite de ce projet fort intéressant. Et puis « I have a dream », … une espèce d’association : « Les amis du couvent de Cinqfontaines », comme il en existe beaucoup dans d’autres pays. Ce sont des volontaires qui contribuent efficacement au maintien des sites historiques (châteaux, couvents, églises). Une telle association pourrait être créée pour le couvent de Cinqfontaines. Affaire à suivre…
Nous vous remercions pour ces informations et nous vous présentons nos vœux les meilleurs pour l’avenir de Cinqfontaines, ce beau couvent des Prêtres du Sacré-Cœur.
Le Père Claude Siebenaler a été introduit comme nouveau supérieur de Cinqfontaines lors d’une messe solennelle, concélébrée par le Père Provincial Jean-Jacques Flammang, le Père Abbé de l’abbaye de Clervaux Michel Jorrot, le curé-doyen régional Martin Molitor, le curé-doyen de Clervaux Joseph Roemen, les Pères Friedo Lenz, Gérard Schumacher et Claude Siebenaler de la communauté de Cinqfontaines, les Pères Edy Ahnen et Nico Turmes de la communauté de Clairefontaine et une dizaine de prêtres diocésains des paroisses autour de Cinqfontaines. Le Père Provincial a remercié d’abord le Père Friedo Lenz qui a été pendant 14 ans supérieur ou administrateur du couvent de Cinqfontaines. C’est ainsi que la communauté religieuse des Prêtres du Sacré-Coeur a pu continuer à rendre des services dans le nord du Grand-Duché de Luxembourg soit dans les paroisses, soit par la maison de Cinqfontaines qui accueille des personnes individuelles et des groupes pour des exercices spirituelles, des sessions de formation, des séjours de prière, de vacances ou de repos.
Avant d’être membre de la communauté de Cinqfontaines, le Père Claude Siebenaler a passé 34 ans dans le Généralat des Prêtres du Sacré-Coeur à Rome, où il a exercé les charges de secrétaire général de la Congrégation, de procureur auprès du Saint-Siège, de secrétaire de l’ambassade du Luxembourg auprès le Saint-Siège. Le Père Claude était un membre fidèle de la communauté religieuse du Généralat. Il est un excellent connaisseur de la ville de Rome qu’il a fait découvrir à de nombreux groupes de pèlerins et de touristes. Après son retour de Rome, le Père Claude a accepté d’aller à Cinqfontaines où le Provincial l’a nommé supérieur.
En proclamant la foi et sa fidélité à l’enseignement de l’Eglise, le Père Claude Siebenaler a accepté la charge d’autorité qui lui est confiée. Les invités, parmi lesquels figuraient le maire de la commune de Wincrange, M. Marcel Thommes, la chorale d’Asselborn qui chantait la messe, des amis du Couvent, des paroissiens des alentours, le personnel du Couvent, tous ont apprécié que les responsables de la Province EUF des Prêtres du Sacré-Coeur ont nommé un nouveau supérieur à Cinqfontaine et donc aussi donné un nouvel avenir au Couvent.
Depuis 1903 les Prêtres du Sacré-Coeur sont en ces lieux d’où les nazis pendant la seconde guerre mondiale avaient chassés les Prêtres du Sacré-Coeur pour récupérer les bâtiments et y rassembler des juifs du Luxembourg avant de les transporter à Auschwitz. Ce chapitre sombre et effrayant de la longue histoire de Cinqfontaines ne s’oublie pas grâce au monument Auschwitz près du Home Jean Dehon. Chaque année des commémorations y sont célébrées et la communauté de Cinqfontaines soutient le nouveau projet de l’association MemoShoah qui compte construire un Centre de mémoire, en face du monument.
Pour plus d’informations sur le Couvent de Cinqfontaines et ses activités, voir sous la rubrique Communauté – Cinqfontaines sur ce site.
Nous présentons nos voeux les meilleurs au nouveau Père Recteur Claude Siebenaler et à la communauté de Cinqfontaines.
Qu’avec son personnel dévoué, que le Provincial a vivement remercié pour les nombreux services rendus, la grande maison de Cinqfontaines ainsi que le Home Léon Dehon puissent continuer à accueillir des groupes et des personnes individuelles pour des activités religieuses, spirituelles, culturelles ou tout simplement pour passer des jours de repos.