12 juillet 2016
12 juil. 2016

Le Fr. Ai Long Vu relit les Couronnes d’amour au Sacré-Cœur

par  Dominique Ai Long Vu, scj

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Dans son mémoire de Master, le Frère Ai Long Vu SCJ relit les Couronnes d’amour au Sacré-Cœur de Léon Dehon

 

12-07-2016 EUFLes Couronnes d’amour au Sacré-Cœur, comme le chapelet, sont un exercice de la piété chrétienne. Pour Léon Dehon, cet exercice ne consiste pas en des répétitions, mais dans la méditation des circonstances de la vie de Jésus. Car le principe du salut, pour lui, est de chercher à connaître Jésus, le Christ (cf. OSP 1, p.137).

Ces exercices de méditation nous aident ainsi à mieux connaître, aimer et servir Dieu. Dans la contemplation de Jésus (surtout à travers l’Eucharistie et l’Evangile), nous ne finissons jamais de découvrir la charité de Dieu, ni aussi de découvrir notre capacité à être conduits par son l’Esprit. N’est-il pas un mystère de la vie chrétienne ?

Les Couronnes d’amour au Sacré-Cœur, à mon avis, sont comme un chemin de discernement de la relation entre Dieu et l’homme grâce à Jésus. Ce discernement ne demande pas seulement notre intellect, mais aussi la grâce de l’Esprit. Car les mystères de Dieu sont éclairés en Jésus par son Esprit.

Il y a deux mouvements dans les Couronnes d’amour au Sacré-Cœur. Un mouvement vers Dieu par Jésus, par les méditations de sa vie. Ensuite, le mouvement en direction des hommes par la mission, les activités sociales, sous la lumière pascale de Jésus, communiquée par son Esprit. Ces deux mouvements peuvent être présentés par trois étapes : d’abord c’est la méditation et la contemplation pour connaître Jésus Christ, ensuite c’est le recueillement des volontés de Dieu communiquées par son Esprit, et enfin c’est la mise en œuvre de la lumière intérieure par une vie d’abandon par amour qui commence par bien faire les petites choses dans la vie quotidienne.

Ces deux mouvements sont les conditions du Règne du Cœur de Jésus dans les âmes et dans la société. Ce Règne, en fin de compte, c’est Dieu lui-même. Le Règne du Cœur de Jésus dans les âmes est la réalisation de ce que saint Paul dit : ce n’est plus moi qui vit, c’est le Christ qui vit en moi (Ga 2, 20). Le Règne du Cœur de Jésus dans la société veut que Dieu soit tout en tous (1 Co 15,28). Dieu est le Dieu de la justice, de la charité, de la miséricorde, de la pitié pour les petits, les humbles et ceux qui souffrent (cf. OSP 1, p.233).

« La vérité et la charité, dit Léon Dehon, ont été les deux grandes passions de ma vie, et je n’ai qu’un désir, c’est qu’elles soient les deux seuls attraits de l’œuvres que je laisserai » (NQT, I, 152). Cette phrase résume, pour moi, le mieux les Couronnes d’amour au Sacré-Cœur, et aussi le fil conducteur de l’œuvre spirituelle de Dehon.

Le modèle de la charité se trouve tout en Jésus. Le Cœur de Jésus est le symbole de l’amour de Dieu envers les hommes et de l’homme envers Dieu. C’est la raison pour laquelle il faut méditer l’Evangile. Car le Cœur de Jésus, pour Dehon, est tout l’Évangile (Cf. OSP 5, p.447).

L’amour de Dieu est gratuit et il peut transformer toutes les actions humaines en actes de charité. Pour demeurer dans cet Amour, un thème cher dans l’évangile de saint Jean, il nous faut faire des efforts qui sont, pour Dehon, la participation à l’Eucharistie et la vie d’oraison (Cf. OSP 2, p.23).

Les méditations devraient se déployer autour de l’Eucharistie. Si celle-ci vient à manquer, les méditations tomberont dans le vide. L’Eucharistie n’est pas seulement un moyen pour entretenir le feu de la charité que Jésus est venu apporter aux hommes. Elle exprime et reproduit l’oblation du Verbe de Dieu, à travers laquelle l’Incarnation et la Rédemption sont réalisées en Jésus-Christ par l’Esprit. Elle est aussi un lieu pour recevoir l’Esprit de Jésus. C’est dans cet Esprit que ce n’est plus nous qui vivons, c’est Jésus qui vit en nous (Cf. Ga 2,20). Ainsi « l’Eucharistie, pour Dehon, n’est pas autre chose que l’Incarnation appliquée à chacun de nous » (OSP, p.421).

Dehon aime beaucoup faire des exercices de méditation et de contemplation. Cela ne veut pas dire qu’il adopte, pour sa spiritualité, la vie contemplative. La méditation et de contemplation visent surtout à construire la vie d’union au Christ qui est comme le fondement des apostolats dans la société. Plus un arbre a des racines bien enracinées dans la terre, plus il supporte mieux les tempêtes ou la sécheresse. De même, plus la vie d’union au Christ est parfaite, plus l’homme résiste mieux aux tentations du monde qui surviennent dans l’apostolat.

En connaissant et en revêtant la charité du Christ, l’homme ne peut pas se replier sur lui-même. Car la charité du Christ nous presse (2 Co 5,14). En se retournant sur eux-mêmes, les hommes arrivent souvent au découragement en découvrant leurs limites. Par contre, en s’oubliant eux-mêmes pour s’unir à Jésus par amour, ils « inspirent des désirs de plus en plus grands » en voulant montrer leur reconnaissance envers celui qui les a aimés le premier, en s’épuisant et en mourant pour eux (Cf. OSP 2, p.501-502). Cette disposition intérieure mène ainsi Dehon vers les activités sociales. L’amour de Dieu est inséparable de l’amour du prochain (cf. Mc, 12, 30-31).

La vérité dont parle Dehon est inscrite dans la charité qui implique en même temps la justice. Cette vérité n’est autre que Dieu lui-même. Jésus ne dit-il pas qu’il est le chemin, la vérité et la vie ? Agir conformément à la volonté de Dieu, ou agir dans son Esprit, est une manière d’agir dans cette Vérité. Comment discerner cette volonté de Dieu qui surgit surtout à l’intérieur de chaque chrétien ?

Pour agir dans la vérité, il faut d’abord apprendre le détachement des créatures. Ce détachement ne veut pas dire un rejet ou un mépris des créatures, mais il s’agit de les utiliser pour une bonne fin : pour la gloire de Dieu et le salut des hommes. Ce que nous avons et nous sommes devrait tendre vers ces deux buts. Plus l’homme est détaché des créatures, plus il peut prendre son essor vers Dieu.

Pour nous, religieux, le détachement des créatures peut être compris aussi la disponibilité pour le projet communautaire. Tenons-nous dans une certaine distance avec nos projets personnels pour mieux nous consacrer au projet communautaire !

Ce détachement des créatures est considéré comme une préparation de se vider soi-même et laisse ainsi une place à l’Esprit pour agir en nous. Le « laisser faire » l’Esprit est ce que Dehon appelle l’abandon. Dans ses souffrances sur la croix, Jésus a poussé un grand cri : Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné  (Mt 27,46) ?

Après tout, l’acte d’abandon sublime de Jésus, pour Dehon, s’exprime par cette disposition : Père, je remets mon esprit entre vos mains (Lc 23,46). Car la mission  du Fils est de faire la volonté du Père (cf. Hb 10,7). Pour les dévots du Cœur de Jésus, cet acte d’abandon fait toute la valeur de leur vie. Car plus il devient habituel, plus il domine les autres (Cf. OSP 2, p.375.). Le fondement de la vocation des Oblats, pour Dehon, est l’ « abandon parfait au bon plaisir de Dieu » (S. FALLEUR, Cahiers, p.199).

L’abandon dehonien n’est donc pas une indifférence ou un refus de ce qui nous semble difficile à porter, ou de ce qui nous cause des souffrances. L’abandon, pour Dehon, est le fruit de la foi et de la confiance en Dieu (NQT, vol. I, p.89). C’est un acte de coopération active dans l’Esprit. Nous pouvons toujours négocier ce qui ne nous semble pas bien, comme Jésus lui-même a demandé à son Père. Après tout, Père, je remets mon esprit entre vos mains (Lc 23, 46).

Les Couronnes d’amour au Sacré-Cœur présentent surtout la vie d’amour et d’union au Christ. « C’est pour moi, dit Dehon, le seul chemin où je puisse marcher un peu solidement. Les autres directions peuvent me convaincre l’esprit, elles ne me saisissent pas assez fortement. C’est ma voie, c’est la vocation. Jésus veut de moi un tendre amour ou rien. L’amour me suffit à tout ; il m’aide à m’humilier, à me repentir, à suivre les conseils de perfection, à me tenir uni à Notre-Seigneur. C’est mon salut et c’est ma sanctification » (NQT, vol. III, p.139-140).

Nous savons que cette Triple Couronne a été publiée en 1905, pendant la période d’activité sociale intense de Dehon. Les Couronnes d’amour au Sacré-Cœur trouveront ainsi le sens plein dans des engagements sociaux. Ces engagements peuvent figurer dans plusieurs domaines. La vie de Dehon nous montre qu’il s’est beaucoup engagé pour ouvrir les consciences à la charité et à la justice. Ce n’est pas seulement la justice divine qui est Dieu lui-même en se donnant en son Fils pour payer les dettes du péché à la place des hommes. C’est aussi la justice dans la société. Dehon a exprimé cet esprit de justice et de charité à travers ses œuvres écrites, ses participations dans le domaine social, sa vie avec les confrères et avec ceux qui le rencontrent. N’est-ce pas un message d’espérance de Dehon, une espérance qui consiste dans la (re-)connaissance de Jésus-Christ et dans des engagements pour établir le Règne du Cœur du Christ dans les âmes et dans les sociétés ?

 

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